Du droit saisi par l’IA au droit saisissant l’IA

Résumé

1. L’intelligence artificielle peut saisir le droit. Si l’aléa judiciaire était précisément mesuré, il serait parfois possible de se dispenser d’aller au tribunal, les parties en conflit pouvant se mettre d’accord sur des bases reconnues et acceptées par elles. Ainsi l’anticipation porterait non seulement sur la norme mais sur sa mise en œuvre pratique. C’est de cette idée qu’est venue la collaboration entre Jacques Lévy Véhel, directeur de recherches à INRIA et Jérôme Dupré, ancien magistrat, qui échangeaient depuis plusieurs années sur les rapports entre droit et mathématiques. A quelles conditions est-il envisageable de traiter d’une manière quantitative des situations juridiques particulières, nécessairement complexes, avec des enjeux humains évidents ? S’agit-il vraiment de modéliser le raisonnement du juge ou plutôt de donner à voir toute la variété des résultats possibles sous un angle probabiliste ? Quelles données prendre en compte ? Quels domaines du droit aborder ? Comment s’assurer de la fiabilité des outils développés ? Comment éviter l’effet perfomatif ? Quelles sont les limites d’une telle approche ? Quels en sont les risques ? Que-ce que cette technologie peut changer dans la pratique du droit, de la justice ?…

2. Le droit est-il réellement soluble dans les mathématiques ? Pour différentes raisons et notamment parce que le droit est porteur de « valeurs », il est possible d’inverser la perspective. L’intelligence artificielle va certes amener de nombreux bouleversements mais les juristes ont su faire face à plusieurs d’entre eux par le passé. L’intelligence artificielle est donc également un champ à investir par les juristes. Parmi les questions juridiques et/ou éthiques soulevées : doit-on protéger les algorithmes ? Comment leur faire face? Qui peut/doit être responsable en cas de dysfonctionnement d’une intelligence artificielle ?  Où se trouvent les vrais responsables en cas de dommage causé par un robot capable d’apprendre : est-ce le robot ou plutôt le concepteur de l’algorithme, l’auteur du programme informatique, le fabricant, le vendeur, le propriétaire, l’utilisateur ? Que sanctionner ? Qui devra payer ? Comment limiter les risques de discrimination, d’atteinte à la vie privée, et au-delà du droit, de dislocation du lien social, de manipulation, de perte de connaissance, d’enfermement (« bulle »)… Le droit peut ainsi saisir l’intelligence artificielle.

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